SAPIGNEUL, mémoire d'un village disparu
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.
Le Deal du moment :
Manette DualSense PS5 édition limitée ...
Voir le deal

Le tétanos... et la première guerre mondiale

3 participants

Aller en bas

Le tétanos... et la première guerre mondiale Empty Le tétanos... et la première guerre mondiale

Message  David.H 23/5/2012, 13:15

Bonjour,

La maladie du tétanos existe depuis bien longtemps, Hippocrate (460-377 avant J.-C.) la connaissait déjà, mais, beaucoup l'ignore, en France elle s'est surtout répandue suite à la première guerre mondiale. En effet, la bactérie Clostridium tetani peut vivre et proliférer dans le système digestif des équidés. Souvent le cheval sera porteur sain mais pourra contaminer le sol avec ses déjections. Lors de la première guerre mondiale environs 8 millions de chevaux auront participés au conflit que cela soit dans la cavalerie mais surtout pour le déplacement de l'artillerie et des approvisionnements.
http://ispb.univ-lyon1.fr/liens/lyon-pharma/lyon1-01/PDF/tetanos.pdf
La présence particulièrement fréquente et relativement abondante de C. tetani dans le tube digestif du cheval est étroitement associée à la contamination du sol par les excréments de ces animaux ; le germe y persiste alors longtemps sous forme de spores (23). Les équidés ingèrent ces spores qui vont alors germer pour donner naissance à des formes végétatives ; il y a ensuite une multiplication de ces bactéries dans leur tube digestif sans entraîner aucun accident ni inconvénient (10).

C'est donc dans les régions à forte densité équine que la terre est particulièrement riche en spores tétaniques (10). Certains sites sont connus comme étant particulièrement tétanigènes ; c'est le cas des emplacements d'écuries et des champs de courses (23), mais également certaines contrées comme la région de Varreddes (Seine-et-Marne) où, lors de la première Guerre Mondiale 1914-1918, de très nombreux chevaux furent utilisés pour déplacer les canons ; cette contrée avait fini par devenir une vaste terre très tétanifère (10). C'est également le cas des terres de Clamart (Hauts-de-Seine) et les sols des champs de bataille de Champagne et de basse Normandie, fortement contaminés lors de la Grande Guerre (23). La terre en Lorraine est particulièrement riche en spores tétaniques puisque 65% des prélèvements effectués dans la région se révélèrent positifs (18). Au siècle passé, il y avait dans les environs de Paris des "régions à tétanos" comme Saint-Denis, Noisy-le-Sec, Aubervilliers. Le cas singulièrement significatif d'un vétérinaire à Aubervilliers est cité à ce sujet puisque celui-ci, à lui seul, avait observé et traité 30 à 40 chevaux tétaniques chaque année et ceci pendant 15 ans (45). En agriculture, l'utilisation de fumier dans les sols cultivés et "fumés" selon l'ancienne méthode, a eu pour conséquence d'enrichir ces terres en spores tétaniques d'où la notion de "terres tétanigènes" (58).

A densités de spores équivalentes, il semblerait que les terres calcaires se révèlent davantage dangereuses en raison du rôle d'adjuvant local de l'ion calcium après pénétration des spores dans le tissu lors d'une blessure, même minime, d'une piqûre par épine, ou d'une excoriation cutanée superficielle (10,58). Les agriculteurs, cultivateurs, jardiniers, palefreniers, ... sont donc particulièrement exposés au tétanos (23).

C. tetani peut encore être retrouvé dans l'air, sur les poussières, sur les vêtements et même sur du matériel médico-chirurgical ou produits pharmaceutiques (plâtre, gélatine, catgut, coton, poudre de talc) et des cosmétiques (10,16,44,58). Les eaux peuvent contenir, par l'intermédiaire du sol et/ou l'air contaminé, des spores tétaniques ; la vase de certaines mers et de certains marais peut devenir ainsi tétanigène (16). Des spores tétaniques ont également été mises en évidence sur des projectiles de guerre et sur les bourres de feutre des cartouches de chasse (10).

[...]

L'histoire clinique du tétanos ne se précise qu'avec les travaux de Bajon, de Heurteloup et surtout de Dominique Larrey (Baron Larrey [1766-1842])(Fig. 4), chirurgien en chef de la Grande Armée d'Empire (10,44). Ce sont effectivement les guerres dont celle de Succession d'Autriche (1740-1748), celles de l'Empire et particulièrement les batailles d'Iéna, de Bautzen, de Dresde et de Waterloo, la Campagne d'Algérie (expédition de Constantine 1836-1837) et celle d'Italie (Brescia 1859), la guerre franco-allemande de 1870-1871 et, plus encore, la Première Guerre Mondiale 1914-1918 qui ont révélé une multiplication des cas de tétanos et des infections tétaniques. Elles ont contribué à élucider un certain nombre d'inconnues étiologiques, épidémiques et pathogéniques et ont amélioré les connaissances de la maladie (10,23,44,63).

Le tétanos... et la première guerre mondiale A001229

LES ENSEIGNEMENTS DE LA GUERRE

C'est à la faveur des poussées brutales et très importantes du nombre de cas de tétanos chez les soldats blessés présentant des plaies occasionnées par des armes dites "blanches" et les projectiles d'armes à feu ou encore les éclats d'obus lors des grandes guerres des XIXe et XXe siècles, que certaines observations importantes ont pu être faites et qu'une partie des connaissances de la maladie se sont dégagées (10).

Lors des guerres napoléoniennes, Dominique Larrey* (Fig. 4) qui eut l'occasion d'observer une multitude de cas de tétanos, décrivit dans ce contexte de guerre une forme d'atteinte qui allait par la suite porter son nom : "le tétanos droit de Larrey" (= orthotonos) (10). Dans ses "Mémoires de médecine militaire et de campagne", le célèbre chirurgien-en-chef de la Grande Armée décrivit encore une autre forme particulière de tétanos, le "tétanos dysphagique" dont le spasme pharyngien constitue la principale manifestation (10,13).

Lorsque, plus tard, le sérum antitétanique fut produit en 1893, c'est encore lors de faits de guerre qu'il est apparu que son utilisation dans les plus brefs délais après la survenue de blessures est favorable et bénéfique alors que les injections tardives se révélèrent d'une très faible efficacité (10). C'est surtout la vaccination antitétanique prophylactique appliquée dans les armées au moment des hostilités qui a montré que celle ci, et elle seule, était la seule solution au problème du tétanos posttraumatique.

Lors de la Première Guerre Mondiale 1914-1918, 2 000 cas de tétanos avaient été signalés au cours des années 1914 et 1915 dans l'armée allemande du frond de l'ouest ; au cours des premiers mois de cette Guerre, 32 soldats sur 1 000 blessés moururent de tétanos dans l'armée britannique (57).

Après l'instauration de la vaccination antitétanique dans les deux camps, seulement 4 combattants sur 10 000 blessés allemands moururent de tétanos en 1918.

Depuis la Grande Guerre 1914-1918, la vaccination antitétanique a été instaurée dans toutes les armées du monde. Le résultat en a été tout simplement extraordinaire comme le montrent les données suivantes : lors de la Deuxième Guerre Mondiale (1940-1945), des mesures prophylactiques rigoureuses avaient été instaurées et les soldats de l'armée des États-Unis avaient été soigneusement vaccinés ; aussi, sur les 2 734 819 combattants blessés, seulement 12 cas de tétanos furent observés dont 5 connurent une issue fatale (0,44/100 000) contre 70 cas de tétanos sur 520 000 blessés (13,4/100 000) au cours de la Première Guerre Mondiale (32,37). Le résultat est encore plus éloquent quand on compare les données relevées au cours de la guerre civile américaine (1861-1865) au cours de laquelle 505 cas de tétanos furent notifiés parmi les 280 000 soldats blessés (32,37).

Ces chiffres montrent à l'évidence l'intérêt de la vaccination et l'efficacité de sa protection.

Tétanos : le vaccin négligé
Le tétanos tue encore en France. L'efficacité du vaccin n'est pas en cause, mais sa pratique. Une étude réalisée à Strasbourg indique que près d'un tiers au moins de la population n'est pas correctement vacciné… et donc pas protégé contre cette maladie pourtant mortelle.

La proportion de personnes protégées avec certitude décroissait régulièrement avec l'âge, passant de 76 % pour les moins de 18 ans, à 70 % pour les 19-28 ans, 47 % pour les 39-48 ans et 45 % pour les 49-58 ans, ce qui laisse supposer que seule une petite minorité des plus âgés sont correctement vaccinés.

Pour info, la durée de ce vaccin est de 10 ans (que ce soit après une vaccination initiale par 3 doses de vaccin injectable, ou par un rappel unique ayant suivi cette vaccination initiale, et ce, après un délai quelconque, même de plusieurs années voire dizaines d'années).
Le tétanos... et la première guerre mondiale 959603


Dernière édition par David.H le 15/3/2020, 22:15, édité 1 fois
David.H
David.H
Accro
Accro

Messages : 669
Date d'inscription : 20/08/2010
Age : 51
Localisation : Aisne

Revenir en haut Aller en bas

Le tétanos... et la première guerre mondiale Empty Re: Le tétanos... et la première guerre mondiale

Message  Bat-Marne.14-18 24/5/2012, 20:20

Bonsoir David et à tous,

Merci beaucoup pour cet article très intéressant à plus d'un titre.

Il est évident que la prophylaxie a une place prépondérante dans cette infection mortelle.

Voici un extrait de l'article de wikipédia :

Le tétanos, est une maladie infectieuse aiguë, grave et potentiellement mortelle, due à Clostridium tetani, un bacille sporulant anaérobie strict et ubiquitaire dont les spores sont souvent retrouvées dans la terre. Il est généralement causé par la contamination d'une plaie par des spores de Clostridium tetani, qui vont ensuite germer et se transformer en bacille sécrétant une neurotoxine qui migre le long des axones des nerfs moteurs jusqu'à la moelle épinière et le tronc cérébral, entraînant des contractures musculaires caractéristiques, des spasmes et des convulsions et éventuellement la mort.

À l'échelle mondiale, le tétanos cause environ 500 000 morts par an, presque tous dans les pays en voie de développement. Sont exposées toutes les personnes risquant de présenter une plaie susceptible d'être souillée par de la terre contaminée par des spores de clostridium. Dans certains cas il peut s'agir d'une maladie professionnelle.

La prévention est basée sur un vaccin anti-tétanique, sur le lavage de toute plaie et l'administration prophylactique d’immunoglobulines anti-tétaniques en cas de plaie à risque. Une fois la maladie installée, le traitement est long et difficile.

L'infection n'est pas immunisante, ce qui signifie qu'il est possible d'être infecté plusieurs fois.

Et voici ce qui vous arrivera si vous êtes négligents :

Le tétanos... et la première guerre mondiale 225px-Opisthotonus_in_a_patient_suffering_from_tetanus_-_Painting_by_Sir_Charles_Bell_-_1809

Spasmes musculaires (opisthotonos) chez un patient atteint de tétanos. Peinture de Sir Charles Bell, 1809.

http://fr.wikipedia.org/wiki/T%C3%A9tanos

Si vous êtes "tétanisés" par cette peinture, rassurez-vous, la tétanie c'est moins grave et n'a rien à voir avec le tétanos !! lol!

Et ne m'en veuillez pas pour cet humour décalé, mon propos est très sérieux. Il ne faut pas penser que seuls les agriculteurs sont les plus exposés.

Alors tous à vos carnets de vaccination et vérifiez si vous êtes à jour dans vos rappels de vaccins !

Cordialement

Béatrice
Bat-Marne.14-18
Bat-Marne.14-18
Accro
Accro

Messages : 256
Date d'inscription : 05/04/2011
Localisation : REIMS

http://frontdechampagne.over-blog.com/

Revenir en haut Aller en bas

Le tétanos... et la première guerre mondiale Empty Re: Le tétanos... et la première guerre mondiale

Message  David.H 24/5/2012, 21:10

Bat-Marne.14-18 a écrit:Et ne m'en veuillez pas pour cet humour décalé, mon propos est très sérieux. Il ne faut pas penser que seuls les agriculteurs sont les plus exposés.

Alors tous à vos carnets de vaccination et vérifiez si vous êtes à jour dans vos rappels de vaccins !
C'est clair. Perso, j'ai dû me faire vacciner contre le tétanos il y'a quelques années de celà. Mieux vaut prévenir que guérir... surtout avec une maladie mortelle dans 80 à 90% des cas...
David.H
David.H
Accro
Accro

Messages : 669
Date d'inscription : 20/08/2010
Age : 51
Localisation : Aisne

Revenir en haut Aller en bas

Le tétanos... et la première guerre mondiale Empty Re: Le tétanos... et la première guerre mondiale

Message  David.H 22/3/2013, 13:00

Bonjour,

Petite correction qui m'a été apporté par un invité du forum Fabien.C, l'article de l'Université de Lyon comporte des erreurs puisque durant la guerre 1914-1918 le vaccin n'avait pas encore été inventé. Il ne fut inventé qu'en 1923 par Gaston RAMON. Les soldats de la première guerre n'ont donc pas put être vacciné. Par contre, on les soignait par injection de sérum tétanique. Gaston RAMON était l'un vétérinaires chargés pendant la première guerre mondiale de produire ces sérums en immunisant des chevaux. Le vaccin antitétanique ne sera commercialisé qu'à partir de 1938.

A propos de Gaston RAMON (1886-1963):
Le tétanos... et la première guerre mondiale Ram

1906-1910 : élève de l'École nationale vétérinaire d'Alfort dont il sort diplômé en 1910.
1911-1920 : son maître de l'école d'Alfort le présente à Émile Roux qui l'affecte en qualité de vétérinaire au service de production des sérums, à l'annexe de Garches de l'Institut Pasteur. Il y travaille sous la direction du vétérinaire Alexis Prévôt. Il est chargé d'immuniser de très nombreux chevaux et de récolter des sérums antitétanique, antidiphtérique et antigangréneux, destinés au traitement de ces maladies.
1915 : Émile Roux lui demande de trouver un antiseptique propre à assurer, dans des conditions de guerre, une bonne conservation des immunosérums (les sérums souffrent de contaminations microbiennes dues à la récolte, la mise en flacons et aux mauvaises conditions de transport). Le choix du formol se révèlera excellent. La même année il perfectionne sa technique bactériologique dans le laboratoire de Maurice Nicolle.
1921 : met au point un procédé de purification des sérums antitoxiques qui va rendre les accidents sériques moins fréquents et moins sévères.
1922 : lors d'expériences entreprises sur le poison diphtérique, Gaston Ramon observe la formation d'une précipitation au sein d'un mélange de toxine diphtérique et de son antitoxine. Il remarque que cette floculation se montre d'autant plus intense que le mélange de toxine et d'antitoxine se sont mutuellement saturées. Cette constatation sert de base à la méthode de dosage par floculation qui permet de titrer in vitro l'antitoxine diphtérique ce qui, auparavant, ne pouvait se faire que par l'épreuve in vivo, sur des animaux d'expériences.
1923 : démontre que la toxine diphtérique qui a subi l'action simultanée d'une petite quantité de formol et de la chaleur, se transforme en un dérivé inoffensif mais qui conserve intact son pouvoir vaccinant. Gaston Ramon lui donne le nom d'anatoxine diphtérique. Après quelques essais, la vaccination par l'anatoxine diphtérique entre dans la pratique. À la même époque, il indique que, d'après des principes identiques, la toxine tétanique peut, elle aussi, être transformée en anatoxine tétanique.
1924 : montre qu'à partir des venins peuvent être obtenus des anavenins.
1925 : instaure le principe des substances adjuvantes et stimulantes de l'immunité, technique qui permet d'obtenir des sérums plus riches en antitoxines en joignant au vaccin une substance irritante pour les tissus.
1925-1926 : applique l'anatoxine tétanique à la prévention du tétanos, chez les animaux domestiques avec Pierre Descombey, chez l'homme avec Christian Zoeller.
1926 : instaure avec Christian Zoeller la méthode des vaccinations associées. Elle consiste à utiliser un vaccin mixte composé d'un vaccin microbien associé à une ou deux anatoxines. On réalise ainsi plusieurs immunisations en une seule injection. Cette technique est à la base de la conception du vaccin diphtérie-tétanos.
1929-1934 : en collaboration avec Robert Debré, effectue des recherches biologiques et immunologiques concernant la diphtérie et la scarlatine.
1934 : élu membre de l'Académie nationale de médecine. Prix décerné par l'Académie : Clotilde Liard (1924).
1934-1940 : succède à Albert Calmette au poste de sous-directeur de l'Institut Pasteur (Paris), alors que Louis Martin en devient le directeur.
1937-1940 : est chargé de coordonner l'ensemble des services assurant la production des sérums et des anatoxines. Entre 1939 et 1940, l'Institut fournit sept millions de doses de sérums et vaccins pour les armées.

Gaston RAMON contribua donc beaucoup à l'avancée de la médecine. L'invention des vaccins et techniques qu'il découvrit ou fit avancer permit de sauver des millions de vies. A notre époque, certains ont la légion d'honneur pour bien moins que ça (tel le russe Gérard DEPARDIOV).
David.H
David.H
Accro
Accro

Messages : 669
Date d'inscription : 20/08/2010
Age : 51
Localisation : Aisne

Revenir en haut Aller en bas

Le tétanos... et la première guerre mondiale Empty que penser de ces polémiques sur le tetanos

Message  dom62 22/9/2017, 11:21

une polémique bien actuelle sur les vaccins remet en cause celui du tétanos.

dom62
Nouveau
Nouveau

Messages : 2
Date d'inscription : 22/09/2017

Revenir en haut Aller en bas

Le tétanos... et la première guerre mondiale Empty Re: Le tétanos... et la première guerre mondiale

Message  David.H 25/9/2017, 21:44

dom62 a écrit:une polémique bien actuelle sur les vaccins remet en cause celui du tétanos.
La France est le pays de Louis PASTEUR. Les vaccins ont sauvés des centaines de millions de vies. Ceux qui n'ont pas discutés des "anciennes" maladies avec leurs grands parents ne peuvent comprendre l'importance de la vaccination.
David.H
David.H
Accro
Accro

Messages : 669
Date d'inscription : 20/08/2010
Age : 51
Localisation : Aisne

Revenir en haut Aller en bas

Le tétanos... et la première guerre mondiale Empty Re: Le tétanos... et la première guerre mondiale

Message  Contenu sponsorisé


Contenu sponsorisé


Revenir en haut Aller en bas

Revenir en haut

- Sujets similaires

 
Permission de ce forum:
Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum